La Libre Pensée et les femmes,
les femmes et la Libre Pensée

Ce livre de Louis Couturier est en accès libre sur Calaméo. Des compléments et corrections seront prochainement mis en ligne.

Présentation

La Libre Pensée ? Une association de républicains sectaires, machos, braillards et paillards, disparue corps et âme en 1940 sous le régime de Pétain, le Ciel en soit loué. C’est, en substance et en forçant à peine le trait, l’esprit d’un livre de l’historienne Jacqueline Lalouette, paru il y a déjà quelques années, consacré à La Libre Pensée en France ( 1848-1940) et dont elle a fait son petit fonds de commerce. La Libre Pensée serait donc morte et enterrée après un siècle d’une courte mais dense existence, devenue une « Église laïque » avec son dogme, son clergé et ses disciples : ainsi statufiée, la Libre Pensée serait un « objet d’histoire reconnu », digne de l’intérêt de « spécialistes » peu scrupuleux quant au respect de la réalité historique. Mme Lalouette en est, qui nous explique doctement qu’on ne peut cantonner les libres penseurs à cette image de « bouffeurs de curé souvent stigmatisés » et que « la laïcité fut pour eux la condition requise pour une véritable « révolution culturelle », voire sociale, qu’ils appelaient de leurs voeux ». Voilà pourquoi elle a estimé que « leur désir utopique de bâtir une nouvelle « cité terrestre » méritait d’être examiné au-delà des outrances et des écarts de langage qui ont parfois accompagné leur discours. »

 

Quant aux femmes, on imagine bien, nous dit Mme Lalouette, la place que les libres penseurs leur laissaient : aucune ! C’est justement cette question de la place des femmes libres penseuses qui a interpellé Louis Couturier. Fouillant dans les archives de l’lrelp (Institut de recherches et d’études de la Libre Pensée), enquêtant, travaillant pour des conférences sur telle ou telle militante, il a rassemblé une galerie de portraits de militantes connues ou méconnues, féministes parce que libres penseuses, libres penseuses parce que féministes. Pour les plus célèbres, leur activité dans la Libre Pensée est en général occultée pour en faire, au mieux, des « saintes laïques », au pire, des féministes « hommasses ».

A l’appui de documents authentiques, d’écrits et de discours, dont certains sont ici re­ produits, Louis Couturier nous présente toutes ces femmes libres penseuses et féministes, d’horizons divers, qui combattaient à l’égal des hommes pour une société de justice, de liberté, d’égalité et de fraternité, pour l’émancipation des hommes comme des fem­ mes et non pour une « utopique cité terrestre ». En conclusion de « La femme et le socialisme » en 1883, le socialiste allemand August Bebel écrivait : « Ce que l’on nomme la question des femmes ne constitue donc qu’un côté de la question sociale. Mai.1 la première ne peut trouver sa solution définitive qu’avec la seconde ». C’est bien ce qui apparaît dans les pages de ce livre de Louis Couturier : la Libre Pensée, hier comme aujourd’hui, est précisément le lieu de rencontre de celles et de ceux qui se rassemblent sous le t1ambeau des Lumières pour suivre le chemin de la Raison dans la passion de la rét1exion, de la discussion et de l’action pour l’avènement de la République sociale.

 

Rien à voir avec une Église et son commerce d’un bonheur dans l’au-delà. N’en déplaise à Mme Lalouette et consorts.

 

Bonne lecture !

 

Pierre GUEGUEN